jeudi 15 mars 2007

Jeune et vieux


Plongeons nous dans le monde de la consommation, dans les bacs à disques. Vous vous rappelez ces trucs bizarres et désuets qu’on met sur ou dans des platines. Oui, ronds et d’un autre temps. Hé bien, Neil Young, folk-rockeur canadien sexagénaire, continue d’en sortir. Pire, il ouvre maintenant ses archives, lâchant dans la nature des vieux enregistrements qu’il n’avait pas éprouvé le besoin de publier auparavant. Le vieux fou ! Comme si on avait trop d’espace libre chez soi pour s’encombrer de vieilleries. Prenez comme exemple le Live At Massey Hall enregistré à Montréal. Pendant une heure durant, on entend Neil Young, alors effectivement jeune, seul à la guitare ou au piano. Pendant une heure ! Qui veut s’infliger ça, franchement, la vie est trop courte, non ? Bien sûr (reprenons notre sérieux), ce concert est magnifique comme une visite en forêt un après-midi de chaud printemps. Ou la vision de la nature enneigée – alors que, toi, tu es dans ta maison et regarde dehors comme à l’intérieur d’une boule de neige que tu secoues… J’adore Neil Young mais il est impossible d’adorer tous ses disques. Il se contente pratiquement de labourer les deux mêmes sillons depuis 40 ans : sa veine country-folk et sa veine électrique. Pépère (et de plus en plus avec l’âge), il vit selon ce rythme alternatif depuis qu'il a quitté le Buffalo Springfield. En réalité, il n’a pas eu de coups de sang électrique depuis son album enregistré avec Pearl Jam (avec leur barde de chanteur bâillonné) il y a quoi, 12 ans. Revenons à ce Live At Massey Hall. A la troisième plage, on entend Neil prévenir : « voici une nouvelle chanson ». Là, il balance “Old Man” qu’on trouvera l’année suivante sur Harvest. On a droit à ses premiers classiques (“Cowgirl In The Sand”, “The Needle And Damage Done”, “Helpless”) assénés avec une simplicité désarmante et la voix d’ange pas encore déchu. Effectuons un saut temporel de 34 ans puisque le film de Jonathan Demme (Le Silence des agneaux mais aussi Stop Making Sense sur les Talking Heads) Neil Young : Heart Of Gold montre le Canadien en 2005, à Nashville pour la première « représentation » de l’album Prairie Wind (qui est un peu Harvest 4 – la revanche). Se remettant de sa crise d’anévrisme et de la mort de son père, Young interprète les mêmes morceaux d’Harvest mais avec trois décennies en moins d'innocence, courbé par le poids des responsabilités échouant à tel patriarche. Young vieillit de manière émouvante. Précisons que Heart of Gold sort en DVD et que le Live At Massy Hall, bootleggé à mort, est downloadable quelque part.

Des images du concert à Massey Hall sont visibles ici : http://www.neilyoung.com/archives/masseyhall/masseyhall.html

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