Certains ont crié au loup quand la marque Futuropolis a été réactivée, Gallimard et les éditions du Soleil se partageant à moitié les destinées de ce Futuropolis 2. Au premier titre, Etienne Robial, fondateur de la première entité. Ce graphiste génial, visionnaire, avait constitué avec la dessinatrice Florence Cestac un laboratoire à la fois tourné vers le présent et le passé, la redécouverte du patrimoine (surtout les classiques américains, Krazy Cat, Batman, plein d’autres, un catalogue de malades). Un incroyable respect du livre, des formats inédits via les volumes 30x40, sortes de showcase picturaux (difficiles à regarder, ranger mais quel plaisir) ou la collection X, petits volumes à l’italienne d’une vingtaine de pages (frustrants mais mignons). Futuropolis se payait parfois des luxes, ce qui rendait encore plus attirantes leurs publications. Quand j’étais ado, je me rendais pas compte du soin qui était apporté à leurs livres. J’avais aussi du mal à les acheter, les trouver etc. L'aventure a dûré, de la fin des 70's jusqu'à la banqueroute (la fin des 80's, je ne sais plus) On pouvait effectivement craindre que les dirigeants du Soleil, maison réputée pour ses albums d’heroic fantasy interchangeables et médiocres, salissent le glorieux nom. Mais ils l’ont plus respecté qu’on ne pouvait ne l’espérer, débauchant David B, Blutch (La Volupté, vraiment terrible), Rabaté, Mathieu, Yslaire…. Ça ressemble un peu à la manière de recruter des grosses équipes de foot mais le résultat est là : une flopée de très bons albums (et je ne parle pas de Ludovic Debeurme que je n’ai pas lu), une collection en partenariat avec le Louvre… et des trucs moins bien (sur le nombre, ça reste marginal et très pardonnable). Un autre chapitre, complètement différent, moins défricheur (la plupart des auteurs sont déjà connus, établis), pour autant absolument pas négligeable. Une direction artistique, un esprit (moins punk que l'ancien, certes, plus bourgeois, Ok), un éditeur à saluer.
Toute cette intro superflue pour évoquer Journal d’un fantôme de Nicolas de Crécy. A la fois carnet de dessin, morceaux d’autobiographie, fiction folle, récits de voyage, réflexion sur l’art de dessiner pour quelqu’un qui gagne sa vie comme ça (et réalise parfois des travaux de commande), ce volume de plus de 200 pages est un bel objet aux lectures hétéroclites, imprimé sur du papier de 130 grammes (il vaut 24 euros, ça me semble plutôt raisonnable). La première centaine de pages m’a enivré, je suis descendu d’un niveau après, deux trois up and down et j’ai recollé à ce récit qui n'a rien de linéaire. Certaines planches valent le retour en arrière, ça sera pour plus tard. Bien que j’aie du mal avec les passages les plus complaisants (quand de Crécy, parlant en son nom, explique que le dessin a été un « doudou » pour lui), je regarde de loin la tranche de ce Journal avec envie de m’y replonger, feuilleter… Je n'ai pas parlé du plaisir des yeux face à ce défilé de couleurs, des pages de garde oranges au noir et blanc suivant. Et la couverture, elle nous lance un appel. Ah, je m’en voudrais de ne pas utiliser la formule de la « mise en abîme », voilà, c’est fait.
Toute cette intro superflue pour évoquer Journal d’un fantôme de Nicolas de Crécy. A la fois carnet de dessin, morceaux d’autobiographie, fiction folle, récits de voyage, réflexion sur l’art de dessiner pour quelqu’un qui gagne sa vie comme ça (et réalise parfois des travaux de commande), ce volume de plus de 200 pages est un bel objet aux lectures hétéroclites, imprimé sur du papier de 130 grammes (il vaut 24 euros, ça me semble plutôt raisonnable). La première centaine de pages m’a enivré, je suis descendu d’un niveau après, deux trois up and down et j’ai recollé à ce récit qui n'a rien de linéaire. Certaines planches valent le retour en arrière, ça sera pour plus tard. Bien que j’aie du mal avec les passages les plus complaisants (quand de Crécy, parlant en son nom, explique que le dessin a été un « doudou » pour lui), je regarde de loin la tranche de ce Journal avec envie de m’y replonger, feuilleter… Je n'ai pas parlé du plaisir des yeux face à ce défilé de couleurs, des pages de garde oranges au noir et blanc suivant. Et la couverture, elle nous lance un appel. Ah, je m’en voudrais de ne pas utiliser la formule de la « mise en abîme », voilà, c’est fait.
J'ai été long, putain.
10 commentaires:
Marrant de voir que Gallimard a récupéré une partie du catalogue Futuroppolis, édité en Gallimard/Futuropolis, comme le voyage au bout de la nuit de Céline mis en image par Tardi ou des vieux trucs majeurs comme La bete est morte de Calvo. En tout cas je note la meem chose que toi. Après avoir lu l'éprouvette, fouiné un peu par ci par là, j'ai bien compris que tout le monde crachait sur cette récupération de futuropolis par Soleil, l'éditeur le moins bien placé à priori pour faire de la bd de qualité. Et finalement le nouveau futuropolis fait des sacrées bonnes bd quand meme. Donc bon ça reste une affaire de récupération houleuse (pourquoi ne pas avoir tout simplement créé une autre entité éditrice, si ce n'est pour profiter du halo de l'ancien Futuropolis) mais au final les bouquins sont biens.
J'ai bien aimé le De Crécy, j'avais lu le petit récit d'origine et ça donnait envie de lire la suite donc agréable après oui le rythme est un peu bizarre mais au final c'est un bien joli album.
"moins punk que l'ancien, certes, plus bourgeois, Ok", dis-tu... N'est-ce pas l'évolution actuelle de la BD en général ? Les efforts de L'Association (ça fait plus de 10 ans maintenant, ça ne nous rajeunit pas !) pour faire entrer la bd dans la littérature, avec essais phiolosophiques, réflexions historiques, reportages bd, autobiographies, et puis l'Oubapo, ont trop bien réussi. La bd, en devenant présentable, a perdu son esprit punk... Surtout depuis qu'elle est devenu un marché énorme...
Il y a une page intéressante là-dessus dans un carnet de Sfar, Sfar et Trondheim rencontrent Moebius qui leur parle de la perte de liberté de la bd aujourd'hui, discours de 68ard mais intéressant dans le contexte.
Ah, je suis content que ça t'ait plu. Surtout toi qui connais le récit d'origine (paru dans le volume collectif Japon, c'est ça ?). Effectivement, je serais plutôt du côté de Menu qui crache sur la récupération (Ecritures chez Casterman et plein d'autres). En même temps, une bonne BD n'a pas d'étiquette. Même si j'aime bien Matt Konture, je préfère lire un album inédit de Futuropolis dessiné par de Crécy ou David B. Quant à la récupération de la marque, c'est discutable, indéniablement. Mais Gallimard n'est pas animé par des philantropes et on peut imaginer qu'ils ont voulu rentabiliser un peu plus l'histoire - Robial est un visionnaire mais pas un gestionnaire.
Zongo ! Quel beau nom ! Sans blague, oui, ce qui était novateur il y a 10 ans ne l'est plus et a été avalé par la machine. Combien de clones de Sfar, de Trondheim, et cie. Honnêtement, c'est pour cette raison que je me vois mal être dogmatique (Association = génie, Futuropolis = sac à pisse) alors qu'il n'y a aucune règle.
Les révoltes sont derrière nous, les bouleversements aussi. Mieux vaut prendre le bon qui se présente à nous, quelle que soit son étiquette. Non, je ne vais pas voter Bayrou...
Oui en effet c'est dans le collectif Japon, collectif plutot pas mauvais au demeurant d'après mes souvenirs. Toutes les histoires n'étaient pas du meme niveau, comme tout collectif qui se respecte.
Je serais aussi plutot du coté Menu à cracher sur toutes les collections parallèles qui se sont montées chez les grands éditeurs en réponse au succès de l'association. Maintenant les gens se barrent de l'asso lassés par l'extremisme (ou attirés par le gain ? ;) ). J'ai pas lu l'éprouvette 3. Mais les deux premières étaient bien orientées tout de meme.
Menu avec l'Asso a apporté énormément de choses. Après, il peut effectivement crier à la récupération. Mais quand il déplore qu'Ecritures copie l'Asso, explique pourquoi il a refusé Blankets, on peut quand même se réjouir que le bouquin (pas mal) soit sorti chez Ecritures, justement. ça reste néanmoins un éditeur précieux et un auteur trop rare (j'adore Meder, un album qui me fait toujours rire).
Moi, j'étais fan de Métal dans ma jeunesse, alors Futuro, à part quelques trucs, j'y comprenais rien :-)
Mais moi aussi j'étais surtout fan de Métal. Alors pour Futuro ça a été à rebours. J'ai dû commencer par Cestac et Schlingo (snif).
Oui mais Cestac c'est triché parce qu'elle publiait aussi dans Métal et faisait partie de l'aventure Ah Nana.
T'as raison, j'aime bien tricher de temps en temps.
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