vendredi 25 mars 2011

La Présidente, Megan Abbott bis & Marianne Faithfull



Entre 1994 et 1996, Autrement a édité d’épatants albums thématiques (L’argent roi, Le Retour de Dieu, Noire est la terre) auxquels ont contribué David B, Lewis Trondheim, Thomas Ott, Fmurr, Bezian, Chantal Montellier et d’autres. C’est dans l’un d’eux qu’ont été publiées les 25 planches de La Présidente, qui a désormais droit à l’Asso à une sortie en album, dans un format bien plus grand.

1er Flashback : en 1992, à l’issue des élections régionales, c’est Marie-Christine Blandin, représentante des verts qui devient présidente du conseil régional Nord-Pas de Calais. Les écolos ne sont pas majoritaires mais un consensus à gauche a poussé sa candidature.

2e Flashback : en 1994, Blutch et JC Menu sont sollicités par Autrement pour participer à Noire est la terre.

Comme ils le racontent –ou le mettent adroitement en scène – ils partent d’abord sur la fausse piste d’une bd de science-fiction qu’ils laissent en plan au bout de quelques pages. Puis Menu a l’idée d’un reportage autour de l’écologiste qui alors le plus de responsabilités. Marie-Christine Blandin, donc. Et justement quand ils arrivent dans le Nord pour leur reportage, le président du Mali rend visite à la Présidente. Menu et Blutch héritent d’un chauffeur, rendent visite au grand-père du premier, interviewe Blandin, se rendent comptent de la complexité de la situation de celle-ci mais aussi de son courage – car elle arrive peu ou prou à imposer en douceur ses vues.
Avec ses anecdotes, ses digressions (le voyage chez le Pépé de Menu), le reportage, dessiné par Blutch et scénarisé par Menu, nous plonge dans une France qui paraît bien lointaine, celle où un le règne d’un Mitterrand presque mourant finissait en semi-pantalonnade et où le candidat à sa succession sortait du bois, Jacques Chirac. On en a pris pour 14 ans !

Pour prolonger le plaisir du lecteur, les planches initiales ont été complétées par des crayonnés, des tentatives de découpages, des croquis pris sur le vif de Blutch (avec lui, c’est embêtant, magnifique devient un cliché) et une préface fort bien sentie de Marie-Christine Blandin, devenue depuis 2001, sénatrice.

La Présidente - l’Association, 12 euros.



Je parlais hier d'Adieu Gloria et j’avais paré un peu au plus pressé. D’abord, en citant à propos de son auteur, Megan Abbott, l’influence d’Ellroy alors que j’aurais dû mettre l’accent sur Chandler ou Hammett – ce qui explique le qualificatif « vintage » employé par certains pour Adieu Gloria. Et si elle joue avec les codes, c’est en gommant toute référence temporelle ou spatiale. Comme elle l’expliquait hier à l’Arbre à Lettres (rue Boulard, 75014 Paris), l’action se situe pour elle dans une ville moyenne.
Toutes ses questions – où, quand, qui - ? – je ne me les étais posé, entrainé par le récit. Hier, je n’avais pas non plus mis l’accent sur le retournement qu’elle opère. Alors que, dans le roman noir moyen (et les films correspondant), les hommes ont le beau rôle alors que les femmes jouent les petites pépées, dans Adieu Gloria, c’est un peu l’inverse, d’où le titre original, Queenpin, le féminin de « kingpin » (« caïd » en argot).

Comme Megan est fan de The Decemberists et de REM, une petite vidéo raccord, extrait de concert à Seattle du premier groupe avec Peter Buck, le guitariste du second.




Justement, avant-hier soir, Marianne Faithfull au théâtre du Chatelet reprenait un morceau des Decemberists (celui qu'elle a enregistré sur Easy Come Easy Go avec Nick Cave), "The Crane Wife 3". Comme elle a eu l’excellente idée de renouveler son groupe – avec notamment Wayne Kramer, oui celui du MC5, tout à sa droite – le concert était très bien. Qui d’autre peut interpréter en deux heures des chansons écrites par-avec Beck, Lennon, Roger Waters, Allen Toussaint, les Stones, the Decemberists, Nick Cave, Dolly Parton et Merle Haggard ?

Mardi, au rappel, elle a repris a capella une chanson des Chieftains.

Deux vidéos, celle de "Working Class Hero" et de la reprise des Chieftains, grâce à Patrice Guino - je ne peux que renvoyer vers son blog RockerParis, cet homme passe sa vie dans les concerts.




jeudi 24 mars 2011

Killoffer, Megan Abbott, Tyler the Creator

Ouh là, ça fait quatre mois que je n’ai pas honoré ce blog fourre-tout d’une petite bafouille. J'ai des raisons valables - des livres dans les tuyaux - mais pas d'excuse. J'avais pourtant plein de choses à raconter (notamment sur le festival d'Angoulême où j'ai animé des tables rondes et des "rencontres dessinées"). Tant pis, ça reviendra dans le fil de la conversation, encore plus décousue qu'avant.


Aujourd’hui même a lieu le vernissage au Point Ephémère du maestro Killoffer à partir de 18h30 (quai de Valmy dans le 10e à Paris).

Je risque d’être méchamment à la bourre car, avant, je serai à l’Arbre à lettres, 14 rue Boulard dans le 14e, pour assister à une rencontre avec Megan Abbott.


Il y a pas dix jours, je ne connaissais pas encore cet auteur américain mais j’ai été alerté par Nicolas Richard, l’homme de goût qui a traduit son dernier roman paru chez nous, Adieu Gloria (éditions du Masque).

Le week-end dernier, petite session de rattrapage express entamée par Absente, publié il y a deux ans chez Sonatine et maintenant dispo en Livre de poche. The Song Is You (titre original) est du pur roman noir qui nous emmène à Hollywood à la toute fin des 40's.Quelques années avant l’intrigue de L.A. Confidential auquel on pense presque immanquablement (c’est un compliment).

Une starlette qui disparaît, des acteurs soupçonné d’avoir commis des horreurs…Docteur en littérature anglais et américaine, Megan Abbott n’a aucun de mal à plonger le lecteur dans l’atmosphère du roman noir à l’ancienne tout en se réappropriant ses codes.




Elle y arrive encore mieux avec Queenpin qui vient de sortir sous le titre d’Adieu Gloria. Raconté à la première personne. Une jeune fille de bonne famille partie pour être comptable saisit la première occasion pour connaître une vie tumultueuse et devient la « pouliche » de Gloria Denton, femme fatale qui bosse pour le milieu. Là (merci Nicolas !), le style de Megan Abbott s’épanouit complètement, des images en peu de mots, des raccourcis qui ont de la gueule, une musique qui reste gravée dans la mémoire.

« Joue-la en douceur et avec élégance, m’intimai-je. Bing Crosby dans un hamac ».



Autre citation. « Cette femme est destinée au panthéon des auteurs de romans noirs. Peut-être même ira-t-elle plus loin encore ». Ça, c’est d’Ellroy à propos d’Abbott.


Finissons avec quelque chose qui n’a rien à voir, le clip de Tyler The Creator et son passage chez Jimmy Fallon il y a un mois. Du hip hop californien qui ne ressemble pas à du hip hop californien, des jeunes qui ne respectent rien et écrivent leur histoire. Gracias.