lundi 9 mai 2011

Appollo, Oiry & Dan Wells, adolescence et tueurs en série



C’est une drôle de période, l’adolescence. Quand on la vit en direct, on n’a qu’une envie, c’est de passer à autre chose et puis, plus on vieillit, plus on se rend compte combien on a été marqué par ces années parfois ingrates où acné et émois amoureux ont fait mauvais ménage. Objet de fascination, ce pan de nos vies qui précède-annonce-précipite la transition vers l’âge adulte inspire Appollo et Oiry. Les deux gars sont pourtant quadragénaires mais, après Pauline et les loups-garous, ils reviennent avec des personnages qui pourraient être leurs enfants* – no offense, les gars, à quelques années près, on est de la même génération.

Une vie sans barjot montre ainsi une bande de potes, entre lycée et fac, le temps d’une soirée et d’une nuit mouvementée. Comme l’un d’eux Mathieu, après avoir eu le bac, s’en va le lendemain pour Paris, cette nuit devient un espace-temps extensible pendant lequel tout semble pouvoir se passer. Un concert de rock, de la violence, du sexe, une teuf, des séances de drague pleines de timidité, de la pose, des mensonges et des éclatantes vérités.

S’ouvrant sur une magnifique séquence où Barjot fait du skate pendant que Mathieu et un autre pote discutent, cet album montre avec quel maestria Appollo et Oiry maîtrisent un sujet qui pourrait être casse-gueule. Comme un Riad Sattouf mais dans un genre et avec un ton différent.

Vous pouvez en lire quelques pages sur le site de Futuropolis. Ici, Li-An en parle bien mieux que moi. Et surtout donne l'avis de son fiston.




Mention spéciale pour les couleurs d’Oiry, même si, comme il le montre sur son blog, en noir et blanc, ses planches ont aussi de la gueule.




Allez, petit clin d'oeil, comme je sais que Une vie sans Barjot a failli s’appeler Teenage Kicks, le classique des Undertones.








En lisant Je ne suis pas un serial killer de Dan Wells, si l’on a vu quelques séries télé, on pense forcément à Six Feet Under et Dexter. La mère, la tante et la sœur du jeune personnage principal (John Wayne Cleaver, le narrateur) travaillent en effet dans une morgue et lui, John, donne volontiers un coup de main. D’autant plus que les macchabées le fascinent et qu’il se sait être un tueur en puissance (mais il se soigne et suit un psy d’où le titre... ce n’est pas un serial killer, bon sang).

Ces références narratives qui s'ouvrent dans notre tête comme des pop-up, on les oublie finalement assez vite pour se laisser bercer par le récit de Wells. Incident déclencheur : un véritable serial killer commence à sévir, signant ses crimes d’une trademark bien dégueu. Aussi fasciné qu’affolé, John tente de mettre au service de la justice ses connaissances astronomiques en matière de tueurs en série. Pas facile quand on a 16 ans et que l’on passe pour un dingo du plus beau tonneau…

Si vous êtes arrivés à me lire jusque-là, vous vous dites sans doute que voilà un auteur qui exploite comme tant d'autres un filon pas loin d’être épuisé. Sauf que Wells fait prendre à son intrigue un virage tellement déconcertant qu’à partir de la 102e page (exactement), on est ferré comme une truite imprudente se maudissant d'avoir mordu à l'hameçon. N’en disons pas plus. A part que Mr Monster, la suite, a été publié aux Etats-Unis et que ça devrait suivre aux éditions Sonatine j’imagine dans quelques mois.

Dans les remerciements, on comprend que si Wells a écrit ce livre, c'est qu'un ami, saoulé de l'entendre déblatérer au sujet des tueurs en série, l'a poussé à transformer cette passion morbide en une activité solitaire, l'écriture. Qui sait ce qui serait advenu sinon...

Ci-dessous la bande annonce du premier livre.



Pour finir, précisons que le nom du « héros » - appelons-le comme ça – a été choisi avec soin. « John Wayne » ne fait pas seulement référence à l’acteur mais au serial killer John Wayne Gacy, le « clown tueur » . Quant à Cleaver, c’est – comme Wells l’explique ici – le nom d’une famille fictive représentée dans un show télé US des 50's.

Du coup, finissons avec la vidéo de "John Gacy Jr" par Sufjan Stevens.




*Désolé pour l’absurdité de cette phrase, car, d’une certaine manière, vu qu’ils les ont créés, ce sont bien leurs «enfants ».

6 commentaires:

Li-An a dit…

Je ne sais pas si j'en parle vraiment bien de cet album. J'ai même loupé la suprême référence private non-joke.
Et j'ai commandé le coffret des Monty Python, nom d'un thon !

Vincent Brunner a dit…

Mieux que moi je crois.
Quelle suprême référence ?
Quant à la rétrospective Monty Python, ça m'a aussi donné envie !

Appollo a dit…

Hey, merci Vince !

Vincent Brunner a dit…

You're welcome, mister. Déjà lu plusieurs fois !

Francky 01 a dit…

Hello.

Cet album, "Une vie sans Barjot", à l'air excellent. Avec ce que tu en dis, ça aiguise ma curiosité :
adolescence, rock, sexe....De plus, les œuvres sur ce sujet peuvent être très réussie et nous touchent obligatoirement, autant en BD qu'au ciné (Gus Van Sant, Greg Arakis, les références suprêmes) !!!
De plus, je ne connais pas très bien le travail d'Appollo et Oiry.

"Teenage Kicks" était le classique de feu DJ John Peel. C'est bête qu'ilsont changé de nom car après "Coney Island Baby", "Girls don't cry", ça aurait eu de la gueule !!
Comme je le dis souvent (et dans ma dernière critique BD "Like a steak machine" Fabcaro), rock'n'roll et bande dessinée font toujours bon ménage.

A + +

Vincent Brunner a dit…

Hello Francky. Oui, si tu ne connais pas le travail d'Appollo et Oiry, je te le conseille. Je vais de mon côté me pencher sur Fabcaro dont j'ai entendu parler à plusieurs fois.

Quant aux titres de Nine Antico dont tu parles, je crois justement que c'est ce qui les a un peu effrayés...